Pont de Normandie

Fleuron du BTP français dans les années 90, cet ouvrage multi-haubané permet de relier la ville du Havre à Honfleur. Ce pont d’une longueur totale de 2 141 mètres de longueur est composé de 1 350 mètres de viaduc d'accès, d’une travée centrale de 856 mètres, et de 2 pylônes hauts de 214 mètres capables de supporter le système de haubanage. Cet ouvrage est devenu au fil des années un axe de transport majeur et une source de développement régional.

CONTEXTE

L’histoire du pont de Normandie est à mettre en perspective avec celle du développement de l’estuaire de la Seine. Dans les années 80, le seul pont permettant de franchir l’estuaire était le pont de Tancarville. Cependant, avec une croissance exponentielle du trafic autoroutier, la construction d’un nouveau pont s’est avérée nécessaire.
La Chambre de Commerce et d’Industrie du Havre donne alors son accord pour un second franchissement de l’estuaire au niveau de Honfleur. À cette date, des progrès techniques majeurs permettent de relier de grandes distances malgré des vents forts à l’embouchure de la Seine. Le projet est ainsi lancé en 1987, soutenu financièrement et politiquement par les votes de conseils régionaux et de conseils généraux. La construction démarre le 11 mai 1990, et le pont de Normandie est mis en service au cours de l’hiver 1995.

TECHNIQUE

Le chantier est situé en zone de terrains alluvionnaires sans aucun ancrage naturel possible. En outre, la zone est écologiquement riche, et la navigation maritime est extrêmement dense. C’est pourquoi, nous avons eu besoin d’un tirant d’air de plus de 50 mètres de haut au-dessus des plus hautes eaux afin que les navires de plus 100 000 tonnes et de 11 mètres de tirant d’eau puissent se déplacer. Ces éléments nous ont conduit à exclure un ouvrage suspendu (nécessitant la construction de massifs colossaux pesant plusieurs milliers de tonnes) sans ancrage naturel. La solution du pont à haubans est alors devenue évidente et avec ses 856 mètres de portée, cet ouvrage détient à l’époque le record du monde dans sa catégorie.
Plusieurs choix structurels nous ont été imposés afin de pouvoir répondre à ces défis techniques. Cette décisions nous a également permis de limiter le coût du projet. Par conséquent, le tablier est particulièrement profilé, et utilise le vent pour assurer sa stabilité. Pour résoudre des problèmes de poids, l’ossature de la travée centrale est mixte (acier-béton). Des câbles « aiguilles » anti-vibrations attachent les haubans ensemble pour éviter qu’ils ne s’entrechoquent sous l’effet du vent et des amortisseurs à la base de chaque hauban complètent le dispositif. Un nouveau type de béton, le béton à haute performance (BHP), plus résistant que des bétons traditionnels a été choisi pour construire les pièces fortement sollicitées comme les pylônes et le tablier.
Enfin, l’utilisation de moyens de calculs puissants a permis d’assurer la faisabilité et la stabilité de l’ouvrage, et de suivre pas à pas sa construction.

L’ouvrage s’annonce d’emblée comme le plus grand pont à haubans du monde, avec une portée centrale de 856 mètres. Avec ce pont en 1995, nous avons largement surpassé le record qui était d’environ 500 mètres établi par le pont Alex Fraser, au Canada.

IMPACT

En reliant Honfleur au Havre, le pont de Normandie améliore la situation du port du Havre sur les plans européen et mondial. En effet, le trajet entre les 2 rives est réduit à 10 minutes au lieu des 40 nécessaires auparavant. Le pont améliore la connexion entre la zone portuaire, les centres industriels autour du Havre et les départements avoisinants, ce qui favorise leur développement. Le port du Havre est donc bien mieux desservi, ce qui conforte sa compétitivité internationale.
Le pont de Normandie est une source de développement économique dans la région, un développement conçu comme durable sur le plan environnemental. Sur ce point, la construction du pont a été accompagnée d’une initiative pour restaurer les zones des vasières de l’estuaire, une première du genre en Europe. Dans le cadre d’un budget de plus de 1,5 million d’euros, des mesures expérimentales ont été prises dès le début des travaux pour draguer ou recréer des vasières menacées d’ensablage notamment sur la rive droite de la Seine. Des chevaux de Camargue ont été introduits pour éviter toute sédimentation excessive dans les vasières. Ces mesures peuvent alors servir de référence pour des projets analogues.

Experts du projet

Maître d’ouvrage
Chambre de Commerce et d’Industrie du Havre

Maître d’œuvre
Direction Départementale de l’Équipement de Seine-Maritime, Mission Pont de Normandie

Chiffres clés

Dates d’exécution
mai 1990 à mars 1994

Béton
36 000 m3

Coffrage
180 000 m2

Armatures
11 600 t

Témoignage

« C’est un chantier prestigieux, qui sera cité dans les ouvrages comme une réalisation exceptionnelle de la technologie française et des entreprises françaises. »

Jacques Chirac lors de la pose de la première pierre